Abstract
Les historiens grecs se sont préoccupés des actions (praxeis) humaines dans l’ordre politique et militaire. Pourtant, la conception qu’ils se font de la justice (dikè, dikaion) – à laquelle ils rapportent plus ou moins directement l’ordre du monde et le cours des choses – comme d’un mécanisme de stricte rétribution et de rétablissement des équilibres rompus; leurs définitions de la nature humaine qui permettent de verser tout débordement au compte de ce qui n’est plus totalement ou plus du tout humain; enfin, la manière dont ils construisent leur autorité d ‘historien : non par l’établissement critique des faits, mais grâce à l’identification de leur point de vue avec celui de la puissance de justice organisatrice du monde, sont autant d’obstacles à une problématisation éthique de l’action. Les notions d’équité, de bienveillance à l’égard des êtres humains, de mesure, de pitié interviennent bien dans leurs jugements, mais finissent toujours par se mouler dans le cadre de pensée dominant de la justice rétributive.