Abstract
Plutôt que de prendre le parti d’une critique – par ailleurs légitime – des usages, notamment managériaux, de la compétence éthique, ce texte propose de prendre le concept au sérieux et de tenter de l’éclairer en s’appuyant notamment sur les approches pragmatistes des émotions développées par James, Dewey et Peirce. Plutôt que de privilégier une accentuation délibérative et argumentative des compétences éthiques favorisée par l’efflorescence et la multiplication des « comités d’éthique », il cherche principalement à penser les émotions comme compétences éthiques, tout en en revendiquant une conception cognitiviste. Les « compétences éthiques » sont tout d’abord déployées sous les accentuations possibles de la responsabilité, distinguées selon la grammaire des pronoms personnels, comme autonomie, comme sollicitude, comme souci du collectif, comme accusation... L’éclairage pragmatiste des émotions comme compétences éthiques permet ensuite d’ouvrir à une approche renouvelée de l’« engagement » pensé comme compétence, couvrant un large spectre allant des engagements volontaires, obéissant à des décisions, jusqu’à des engagements à dominante émotionnelle caractéristiques par exemple des « communautés esthétiques », du ressentir, du vibrer ensemble.