Abstract
La floraison d’études sur le scepticisme antique de ces dernières décennies a fait au moins une victime, à savoir Philon d’Alexandrie, auquel elles ont accordé une part de plus en plus restreinte, alors même que Philon est incontestablement celle de nos sources la plus proche d’Énésidème qui refonda le pyrrhonisme au ier siècle avant J.-C. Il importe donc d’établir quelle confiance on peut accorder à ce que Philon nous dit, en plusieurs endroits de son œuvre, du courant sceptique. On propose donc un bref status quaestionis, avant d’analyser la question des tropes. On soulève enfin le problème plus général de la technicisation croissante de la philosophie ancienne et de la place quasi hégémonique qu’occupe actuellement la méthode analytique. Un auteur comme Philon est difficile à décomposer en propositions, dont on chercherait à définir les relations, et il n’a pas écrit – si l’on excepte le De aeternitate mundi, dont l’authenticité est discutée, le Probus, le De prouidentia et l’Alexander – une œuvre qui se présente comme explicitement philosophique. Il incarne donc un problème qui le dépasse : que peut faire la recherche lorsqu’elle est confrontée à tous ces textes dans lesquels la philosophie se trouve mêlée à ce qui n’est pas elle-même, qu’il s’agisse de littérature ou de religion?