Abstract
Dans cet article, nous analysons le passage dit « mathématique » de l’Épinomis. Dans le programme de formation proposé pour les futurs membres du conseil vespéral de vigilance (990c5-991b4), certains interprètes modernes ont cru voir un témoignage capital pour l’histoire des mathématiques grecques anciennes portant sur la question de l’irrationalité. L’analyse du lexique et du mode de composition du texte – un collage maladroit d’expressions reprises aux loci mathematici platoniciens –, la confrontation avec la littérature mathématique conservée et ce que l’on sait de l’histoire de cette discipline avant Euclide montrent que cette interprétation, pourtant largement répandue, est sans fondement. En revanche, il est possible de reconstituer une intention philosophique compréhensible et mieux à même de rendre compte de certaines particularités du passage en consultant les commentateurs anciens (Nicomaque de Gérase, Théon de Smyrne, Jamblique de Chalcis, Proclus de Lycie). En privilégiant le passage conclusif sur le « lien » des mathématiques (991d8-992a1), ils identifiaient une tout autre question : celle de l’unité des mathématiques, à partir de laquelle le passage mathématique prenait à leurs yeux tout son sens.