Abstract
Le présent article se propose de traduire et de discuter un certain nombre de textes arabes sur la question de l’éternité du monde. Il s’agit de fragments perdus en grec de Jean Philopon et de Proclus, peu connus ou inconnus, et de textes des philosophes arabes des ix e - xi e siècles qui les ont lus, discutés et utilisés. On montrera, en se fondant sur ce panorama philologique renouvelé, que loin d’être un dogme partagé par tous les hellénistes arabes, l’éternité du monde n’a été soutenue que par une portion d’entre eux. On montrera aussi que chaque camp, à l’intérieur de la tradition philosophique elle-même, s’appuie sur un même corpus de textes – le livre VI du Contra Proclum de Philopon – pour argumenter en faveur des deux branches de l’antinomie. On montrera enfin que si, par ce canal, la tradition philosophique de langue arabe a eu accès à la cosmologie médio-platonicienne de Taurus et à ses développements néoplatoniciens, elle les a également profondément transformés, en leur appliquant une grille de lecture empruntée à la théologie rationnelle contemporaine, le kalâm.