Abstract
L'Homme spéculaire tente de faire pour l'épistémè occidentale tout entière ce que Michel Foucault avait fait pour l'épistémè du XVII e siècle dans Les Mots et les Choses. C'est dire l'ambition et l'ampleur de cet ouvrage. La métaphore fondamentale que Rorty découvre -et dont il démonte les effets - au sein de notre culture, est celle de l'Homme Miroir de la Nature. De là, découlent des pseudo - évidences séculaires dont nous ne sommes toujours pas affranchis : à commencer par l'existence de quelque chose comme l'esprit; puis la définition de la philosophie comme théorie de la connaissance; et la version occidentale de la vérité comme correspondance du reflet - dans-le -miroir à ce qu'il reflète. Mais l'apport de Rorty n'est pas seulement historico - critique. La philosophie ainsi délivrée du complexe du miroir ouvre sur le programme d'une nouvelle sophistique dont le modèle emprunte à la fois à Wittgenstein, à Heidegger et au pragmatisme. Et ce n'est pas une des moindres importances de ce livre que la rencontre qu'il amorce entre philosophies continentale et anglo-saxonne.