Abstract
Dans cet article, nous interrogeons la désuétude du projet initial de l’intelligence artificielle, fondé conjointement avec la science cognitive, et partageant avec elle ce qu’on appela plus tard l’hypothèse computationnelle de l’esprit, c’est-à-dire l’idée que la pensée intelligente peut être décrite sous la forme de programmes informatiques. Si cette désuétude reflète en partie notre éloignement d’une période très particulière du xxe siècle, celle des années 1950 marquées par les angoisses de la guerre froide, nous souhaitons montrer qu’elle est sous-tendue par une désuétude plus profonde encore, celle d’une conception hétérodoxe, voire « alchimique », de la science. Malgré son abandon au cours des années 1980, nous explorons l’idée que cette hypothèse reste tout de même vivace comme tentation congénitale au projet même de la science cognitive, en examinant les thèses récentes de Gualtiero Piccinini qui considère les mécanismes neuronaux comme une forme élargie de calcul.