Henri de Lubac et la philosophie
Abstract
Le Père de Lubac mettait une certaine coquetterie à se déclarer exclusivement théologien et à se dire ignorant en philosophie. En réalité il se dépréciait injustement. Non seulement il avait reçu et assimilé une bonne formation classique en philosophie, dans les limites de l'enseignement des scolasticats d'alors, mais il avait poursuivi une étude personnelle de saint Thomas et surtout, stimulé par Auguste Valensin, il avait lu avidement L'Action de Blondel. C'est de Blondel que proviennent l'impulsion et l'idée maîtresse de sa théologie, la nécessité gratuite du surnaturel. Sa tardive et mémorable intervention dans le débat de la philosophie chrétienne démontrait que le jeune professeur d'histoire des religions aux Facultés Catholiques de Lyon se mouvait à l'aise dans la critique des idées. En effet toute l'oeuvre du Père de Lubac, si variée, étalée sur un demi-siècle, possède une sorte de frange philosophique, selon «l'occasion» comme il aimait à dire, et en fonction d'une préoccupation apologétique constante. On mentionnera ses recherches demeurées inégalées sur l'humanisme athée, la réhabilitation de Proudhon, la remarquable théodicée latente des Paradoxes et des Chemins de Dieu , la rencontre du bouddhisme comme sagesse philosophique, la vision prophétique de Teilhard de Chardin, l'éloge très vivant de Pic