Abstract
La présente étude suggère que l’analyse aristotélicienne de la sōphrosunē dans l’ Éthique à Nicomaque II 7 et surtout III 13-15 (ou : III x-xii) gagne à être comprise sous l’angle de son héritage platonicien et, en particulier, de l’examen de la conception de la sōphrosunē comme « science de la science » défendue par Critias dans le Charmide et de la définition de la sōphrosunē en termes de tripartition de la cité et de l’âme dans la République. La première partie présente les objections soulevées par Socrate contre la notion de la sōphrosunē comme science réflexive défendue par Critias dans le Charmide, et suggère comment Aristote pourrait avoir pris ces objections en compte. La deuxième partie discute quelques caractéristiques choisies de la sōphrosunē en République IV et soutient que cette dernière conception s’éloigne du Charmide mais se rapproche de la conception aristotélicienne de cette vertu. La troisième partie positionne la conception aristotélicienne de la sōphrosunē d’une part relativement à sa conception des vertus de caractère et de sa propre méthode d’analyse et d’autre part relativement à ces deux dialogues de Platon. En conclusion, la présente étude identifie des différences cruciales entre les traitements platonicien et aristotélicien de la sōphrosunē et indique comment Aristote tient compte des arguments de Platon tout en se distanciant suffisamment de son aîné pour offrir sa propre analyse distinctive de cette vertu spécifique.