Abstract
Dans cet article nous avons essayé d'examiner la valeur de l'attribution traditionelle du commentaire De Anima à Simplicius. En comparant ce traité aux grands commentaires de Simplicius (sur les Catégories, la Physique et le De Caelo d'Aristote), nous avons été en effet frappés par les divergences de style, et de langue, ainsi que par la différente manière de commenter. Dans la première partie nous démontrons que l'auteur de l'In D.A. a écrit également la Metaphrasis in Theophrastum, qui nous a été transmise sous le nom de Priscien le Lydien. 1° Dans le In D.A. l'auteur renvoie à une de ses œuvres, qu'il appelle „Epitomé de la Physique de Théophraste". En réalité, cette référence se rapporte à un passage de la Métaphrase de Priscien, où la même problématique est exposée dans des termes identiques. — 2° Une comparaison détaillée, qui porte sur l'ensemble des deux œuvres, nous révèle une telle ressemblance de style et de pensée — il y a même des phrases à peu près identiques — qu'elle ne peut s'expliquer que par l'hypothèse de l'identité de l'auteur. Dans la deuxième partie nous essayons d'identifier l'auteur de ces deux œuvres qui pourtant nous ont été transmises sous deux noms différents. L'étude de la tradition directe et indirecte n'apporte guère de solution, puisque l'attribution des deux textes, l'un à Simplicius, l'autre à Priscien, y paraît très solide. Ce n'est donc que par une critique interne de l'In D.A., notamment par la confrontation avec les commentaires de Simplicius, dont l'attribution est certaine, que la question pourra être tranchée. 1° Dans l'In D.A. l'auteur renvoie trois fois à son commentaire sur la Physique. Pourtant, il est bien difficile de retrouver dans le grand commentaire de Simplicius trois passages dont le contenu et surtout le vocabulaire prouvent que l'auteur s'y réfère. — 2° Dans l'In D.A. on ne retrouve pas les traits caractéristiques de la méthode de commenter de Simplicius, ni l'approche du texte par la documentation historique, ni les longues discussions avec les exégètes antérieurs, ni l'exposé prolixe et bien structuré; d'autre part aucun des commentaires de Simplicius ne témoigne de la phraséologie tortueuse de notre oeuvre, ni de ses formules stéréotypées. — 3° La différence doctrinale est encore plus importante. Nulle part chez Simplicius n'apparaît la théorie de l'âme comme όριστική, qui est si fondamentale dans l'In D.A. (όρίζω y est un concept-clé). Les rares digressions de l'In D.A. à propos de questions physiques et logiques ne correspondent pas aux exposés de Simplicius sur les mêmes problèmes. Ainsi nous avons confronté la doctrine de la ‚physis', de l'âme et de son ‚automotion’ et enfin le rapport entre le ‚genre’ et les différences ‚constitutives’ et ‚diérétiques’. De tout cela se dégage une telle divergence entre l'In D. A. et les autres commentaires qu'elle ne peut s'expliquer par une évolution chez Simplicius lui-même. L'in D.A. lui est donc faussement attribué; et puisque nous avons établi que ce commentaire est du même auteur que la Métaphrase, nous pouvons conclure qu'il a été vraisemblablement écrit par Priscien le Lydien, un philosophe néoplatonicien dont nous savons seulement qu'il a accompagné Damascius et Simplicius en exil en Perse