Abstract
La philosophie « sert à nuire à la bêtise », écrit Deleuze en 1962. Huit ans plus tard, dans Différence et Répétition, après avoir défini la bêtise de plusieurs manières différentes, il l’évoque pourtant comme « la source du plus haut pouvoir » de la pensée. Le but de cet article est de reconstruire l’unité et la compatibilité de ces diverses formules, notamment à partir du chapitre 3 de Différence et Répétition. On s’intéresse d’abord à l’objet central de ce chapitre, « l’image dogmatique de la pensée ». On s’interroge ensuite sur la variété des définitions de la bêtise, que cette « image dogmatique » prétend ramener à l’erreur. On précise enfin les rapports de la bêtise avec les autres « structures de la pensée » que Deleuze mentionne au titre des « négatifs » de la pensée. La relation entre la pensée philosophique et la bêtise est destinée à rester aussi étroite que tendue : la question est finalement celle du rôle qu’y joue « l’image de la pensée » elle-même.