Abstract
Le récit du siège et de la prise d'Amid, place-forte de Mésopotamie, en 502, constitue un exemple intéressant de la manière dont se transmet un récit historique de la tradition grecque au domaine syriaque et au-delà. Présent dans l'historiographie grecque (Évagre, Procope, Malalas, Théophane) comme un épisode de la brève période d'affrontement entre Perses et Romains dans les années 502–507, ce récit connaît un succès particulier dans les textes syriaques où il passe du domaine de l'histoire à celui de la légende. Cet épisode apparaît dans l'Histoire d'Édesse de 506 du pseudo-Josué, dans l'Histoire ecclésiastique du pseudo-Zacharie et dans toutes les chronographies importantes: celle de Zuqnin, du pseudo-Denys, dans celle d'Édesse de 1234 et dans celle de Michel le Syrien. Il est par ailleurs mentionné dans toutes les petites chroniques, qui indiquent la date, la durée, le nombre de victimes du siège. La similitude entre la version de Procope et celle du pseudo-Zacharie a déjà été relevée mais n'a jamais fait l'objet d'une enquête qui permette d'élucider les liens qui les unissent et d'établir par quelle voie ce texte est passé du grec au syriaque où il a été retravaillé pour répondre à des besoins apologétiques. La chute de la ville aux mains des Perses est en effet présentée à partir de l'Histoire ecclésiastique du pseudo-Zacharie comme une punition pour les chrétiens infidèles, livrés au roi perse Kavadh à qui le Christ serait apparu et aurait donné la victoire. Le récit est dès lors utilisé pour exhorter les communautés chrétiennes à persévérer dans la foi « orthodoxe ». Cette version du siège est ensuite traduite de manière inattendue en arabe puis en géorgien, dans ce qui semble être le reste d'une chronique.