Abstract
Thomas Kuhn, dans la Structure des révolutions scientifiques, décrit les révolutions scientifiques comme des changements dans la vision scientifique du monde. Or, ce changement de vision du monde semble trouver une partie de ses racines dans la psychologie des formes. La Gestaltpsychologie a permis de remettre en cause certaines conceptions classiques de la psychologie issues de l’empirisme du xviiie siècle et par là même de penser les changements de perception non comme des changements d’interprétation, mais comme des renversements d’une structure à une autre. Ces changements visuels de forme sont particulièrement bien exemplifiés dans les figures ambiguës sur lesquelles Kuhn s’appuie pour analyser le passage d’un paradigme à autre, bien que les gestaltistes, comme Köhler, aient rejeté l’hypothèse selon laquelle il serait possible de « voir » directement une signification. Reste à savoir si ces Gestalt-switches ne concernent pas davantage les historiens des sciences que les scientifiques eux-mêmes.