Abstract
Être transgenre implique des relations uniques à son propre corps, ainsi que la question du récit dans la formation du sujet – deux thèmes-clés chez Merleau-Ponty. Mais même si l’on accepte d’aller au-delà de l’histoire stéréotypée d’être « pris·e dans le mauvais corps », tant dans les communautés trans que dans le discours public plus large il existe une tendance fâcheuse à universaliser de tels récits – et ce, en dépit de l’hétérogénéité apparente que l’on retrouve dans les descriptions individuelles à la première personne. La question émerge donc à savoir : comment rendre compte philosophiquement de cette différence à la première personne tout en visant une politique de solidarité? Cet essai cherche à utiliser la phénoménologie de Merleau-Ponty dans un sens pratique, en se concentrant sur sa description du « schéma corporel » pour atténuer cette tension. En effet, tandis que Merleau-Ponty nous fournit un ensemble général d’instruments pour comprendre la relation entre incarnation et comportement, ses exemples phénoménologiques sont souvent fortement singuliers. De la sorte, dans le contexte des subjectivités transgenres, le but est de creuser davantage cet espace discursif, comme prologue pour une praxis qui soit plus réceptive à l’expérience vécue des personnes trans.