Abstract
As reflected in the spirit of the times, certain fundamental changes have occurred in such concepts as nature, reason, and life. While in the liberal era nature appeared to man as a sphere to be conquered by him for the enhancement of his material happiness, today it is an ideal offering an escape from the vicissitudes of social life. Confidence in the power of reason and of science turns into hatred of intelligence, because the latter is an instrument of domination for the privileged classes, and leads the majority of men to accept utopian dreams which cannot be realized. Whereas the philosophy of liberalism glorifies the individual as an active agent having a higher meaning, he now falls into disrespect as a merely passive link in the overpowering totality of life.This article analyses Hamsun as a typical representative of such a postliberal ideology. At all points where he develops his own interpretation of life and the world, he portrays the longings of a disillusioned bourgeois civilization in terms of these new concepts. The ideal which he pictures as an escape from the bourgeois civilization of our times is only superficially in conflict with it. His most important subjects and themes derive their social function from a historical situation which calls for an attitude of obedient subordination to authority.There are two elements in Hamsun's dream of a return to nature : the resentful disillusionment which wants to fence off nature as its private property, because it has little to expect from the social reality in which it lives, on the one hand ; and on the other, the adoration of the heroic as reflected in the overpowering sweep of the forces of nature. This admiration of power is further enhanced by the glorification of peasant life. The ideal of nature is finally characterized by a biological interpretation of erotic relationships. Brutality and sentimentality interchange abruptly within such an ideology as they do in actual authoritarian character types of the present day.Hamsun criticizes all important aspects of urban life, exhibiting another form of his anti-rational attitude. However, it is important to notice his relationship to industry : he has contempt for the working class but utters not one critical word against the employers.His philosophy of life, which minimizes the individual and exalts the powers that be, corresponds to the trends of the time : men are scurrying around like ants, without plan or aim ; most of them are crushed, and this is justified because the forces of life require unconditional obedience and absolute subordination of the individual.Finally the author presents some characteristic documents about the influence which Hamsun has exerted. In the post-war period socialists and liberals were singing the same paeans of praise for Hamsun as the fascists more recently.Les trois transformations les plus importantes de la conscience sociale au cours de ces cinquante dernières années, concernent les idées de nature, d'esprit et de vie. Dans le libéralisme, la nature apparaît avant tout comme une réalité que l'homme doit maîtriser pour accroître ses richesses matérielles. Aujourd'hui, dans son apparence immédiate, elle devient un idéal qui doit libérer les hommes des déceptions que leur inflige l'existence collective. Au lieu de la confiance ancienne en l'esprit et en la science, éclate maintenant la haine de l'intellect, qui sans doute offre aux classes privilégiées un instrument affiné de domination, mais n'apporte à la majorité des hommes que des utopies rationalistes sans signification concrète. L'individu, que la philosophie libérale transfigurait en lui attribuant une fonction supérieure, apparaît comme un élément passif d'une totalité toute puissante, la vie.L'article montre ensuite en Hamsun un représentant typique de cette idéologie post-libérale. Sur tous les points décisifs, sa conception de l'homme et de la nature révèle sa véritable signification : elle traduit dans des catégories nouvelles les aspirations de la bourgeoisie déçue. L'opposition entre son idéal et la société bourgeoise est d'ailleurs tout apparente. La fonction sociale de ses thèmes les plus importants est la préparation d'une humanité soumise, prête à s'incliner sans protester devant l'autorité.Derrière le rêve de Hamsun d'une existence en accord immédiat avec la nature, on aperçoit le ressentiment petit bourgeois, qui veut faire de la nature sa propriété privée parce qu’il a peu à attendre dans la réalité. On aperçoit aussi le culte de l'héroïque en soi, que symbolise la violence desphénomènes naturels. Le culte de la force est encore accentué par la transfiguration du paysan. L'idéal d’une vie conforme à la nature est finalement caractérisé par la représentation biologique que se fait Hamsun des rapports érotiques. Constamment, dans cette idéologie, sentimentalisme et brutalité se juxtaposent sans intermédiaire — mélange qui appartient en propre également au type d’homme autoritaire du présent.L’anti-intellectualisme de Hamsun se manifeste sous forme d’une critique des éléments les plus importants de la civilisation urbaine. En particulier, son jugement sur l’industrie est décisif ; il méprise le prolétariat, sans jamais dire un mot contre les entrepreneurs.Sa représentation, marquée par l’actualité, du néant de l’individu et du respect qui convient devant les puissances existantes, s’exprime aussi dans une philosophie de la vie. Les hommes grouillent comme des vers, beaucoup sont piétinés ; mais cette destinée est juste, car la puissance de la vie a le droit d’exiger de l’individu obéissance sans réserve et soumission absolue.A la fin, l’article rassemble quelques témoignages caractéristiques de l’accueil fait à Hamsun. Il en résulte qu’en particulier après la guerre, socialistes et libéraux ont admiré sans critique Hamsun de la même manière que des littérateurs fascistes.