Abstract
La bioéthique est animée par la volonté d’une reprise en main de la question des fins sur celle des moyens du soin. Ainsi, la bioéthique peut-elle se comprendre comme une tentative de juguler le discours de la rationalité instrumentale qui déferle dans le champ de la maîtrise du vivant et du monde vécu, en y altérant ou détruisant les fragiles liens de soins mutuels. À cet endroit arrivent les interrogations. La gravité de situations inouïes impose-t-elle une éthique inédite? N’encourage-t-elle pas une idéologie bioéthique qui instrumentalise l’éthique, dérive allant d’une attention à l’action vers une science de l’action dans une approche procédurale de la décision? Si la bioéthique s’est bien souvent concentrée sur l’éthique médicale et ne l’a pas toujours articulée avec une réflexion plus générale sur la vie vulnérable considérant la vie en nous, entre et en dehors de nous, peut-elle nous dispenser d’une réflexion plus en amont sur la nature de la raison pratique déployée elle-même sur l’assise d’une anthropologie du soin et de la vulnérabilité?