Abstract
Le terme de style n’est pas conceptualisé explicitement par Foucault, quoiqu’il apparaisse au fil de toute son œuvre. Dans le texte qu’il consacre au Rêve et l’existence de Binswanger, Michel Foucault est encore fortement influencé par la phénoménologie et l’existentialisme : le style y est défini comme le moment où l’expression est effectivement adressée à quelqu’un, et cherche à se faire comprendre. Le style est donc encore compris selon les coordonnées phénoménologiques de la subjectivité et de l’être-au-monde. Dans la période structuraliste des Mots et les choses et de L’archéologie du savoir, le style au sens strict caractérise au contraire un a priori historique anonyme. La difficulté, que ne parvient pas totalement à résoudre Foucault dans sa conférence sur l’auteur à la Société française de philosophie, est alors de comprendre comment un individu peut inaugurer un style de savoir ou de discours. C’est dans l’Histoire de la sexualité que Foucault parvient à articuler critique et généalogie de la subjectivité à travers le concept de style : avec l’idée d’une stylistique de l’existence, Foucault ne pense plus le style comme l’expression d’un sujet ou comme une simple marque anonyme et collective, mais comme l’opérateur d’une subjectivation par la recherche d’une excellence éthique substantielle. Cette conceptualisation foucaldienne du style, dans les années 1980, doit être mise en perspective avec les textes militants du philosophe, où la recherche d’un « style de vie homosexuel » est un enjeu qui dépasse la simple obtention de droits.