Abstract
Les écrits d’Étienne Souriau sont traditionnellement associés à l’esthétique sans qu’on sache nécessairement quelle orientation celui-ci entendait précisément lui donner, ni quelle inscription il lui réservait au sein de la philosophie. La présente étude tâchera de ressaisir les étapes de la constitution d’une discipline à l’intérieur de ce discours, discipline au départ circonscrite et assignée à une tâche spécifique, mais qui, à la faveur d’un élargissement de son objet – non plus la forme mais l’ art, défini comme processus instauratif présent à tous les niveaux de l’existence comme son essence –, a fini par s’identifier à la philosophie tout entière, à son tour désignée comme art, à devenir ainsi philosophie première, cosmologie, mais aussi morale. L’esthétique, discipline incertaine, dont la légitimité, au début du xx e siècle, paraissait rien moins que justifiée, accéderait ainsi dans le système de Souriau à une forme de gloire épistémologique et cosmologique à la faveur d’une nouvelle forme de sacralisation de l’art.