Diogène n° 258-259-258 (2-4):96-109 (
2019)
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Abstract
En dépit des déclarations fracassantes sur le « tabou » qui pèserait en France sur l’histoire de la colonisation, celle-ci se porte bien. Les recherches se sont multipliées dans les vingt dernières années et elles sont à l’origine d’une production bien insérée dans les revues et en bonne place sur les tables des librairies. Au fil d’échanges nourris avec les réseaux anglophones, ces recherches se sont postcolonialisées de façon critique et participent de plain pied aux débats de la « nouvelle histoire impériale ». L’histoire de la colonisation est enseignée dans le secondaire et à l’université et là aussi la discordance est flagrante entre des débats publics qui dénoncent sempiternellement sa marginalisation, ou au contraire sa surreprésentation, et une diffusion active reposant notamment sur la traduction de travaux influents comme l’important programme de recherche formulé au cours des années 1990 par Frederick Cooper et Ann Stoler. Dès lors, comment relier ces trois éléments : le discret mais solide épanouissement académique de l’histoire de la colonisation depuis la fin des années 1990, la virulente controverse ouverte à partir de 2005 autour des études postcoloniales et un sens commun qui s’est approprié ce terme séduisant, mais qui peine à lui donner un contenu allant au-delà de la fausse évidence d’une distanciation mécaniquement produite par l’usure du temps?